« Arrête de penser que tu es au-dessus de tout, Ezekiel. » Le garçon tourna la tête vers sa sœur. C'était un monstre. Un monstre car il avait des airs d'ange noir, avec ses cheveux blonds et son sourire canaille. On remarquait vite qu'il aurait été capable de vendre sa mère pour avoir un mauvais coup à faire. Et un bon. « Mais je le suis, ma chère Johanna. Je le suis. » Elle s'est lentement approchée du gamin. Il avait quinze ans. Elle s'est posée à côté de lui, avec un petit sourire sur les lèvres. Spécialement, elle était venue lui rendre visite à Godric's Hollows, où il créchait avec sa tante. « Ne le crois pas, minus. A mes yeux, tu seras toujours cet incompétent qui est trop gentil, trop sympa, pas assez.. Serpentard. Tu n'es rien, Ezekiel. Tu crois que c'est pourquoi, que tu es là ? » Il n'a pas semblé vexé pour le moins du monde. Cela ne l'atteignait pas. Rien n'atteignait Ezekiel. Il était.. au-dessus de tout. Ou, du moins, de ça. « Si tu veux. Mais ne crois pas que, toi, tu vaux mieux que ça. T'es qu'une prostituée qui se vend pour acheter une maison sous prêts de cinquante ans, avec un mec qui va te délaisser pour une fille plus jeune. T'es rien. Vraiment. Tu pourras te mentir autant que tu veux, tu n'es rien. » Il avait six ans de moins qu'elle. Il lui devait du respect. Non ? Les doigts moites Johanna ont aggripé le col noir du jeune homme, le soulevant légèrement sur le dos du canapé. Il a rit. « Et t'en viens toujours aux mains. T'es vraiment digne de papa. » Personne n'a vu le léger mouvement de cil, étrange, au mot papa. Elle l'a regardé férocement. « Ce n'est pas parce que rien ne te blesse que c'est pareil pour tout le monde. » Et elle est partie, le laissant là, à arranger son col en grommelant.


Il est monté dans le train sans un regard en arrière. Sa mère lui faisait de larges signes de main. C'était une femme charmante, avec de belles formes et des yeux chocolats tendres et aimants. Son père, c'était une autre affaire. Il avait des yeux bleus froids, des cheveux bruns rangés sur le côté et un charisme de dictateur ; attrayant mais dangereux. Il avait les mains derrière le dos, regardait le train rouge vif. Trop, d'après lui. Les gens fronçaient le nez, en passant à côté de la petite famille. La femme sentait le souffre. Trois jeunes filles se dégagèrent pour coller leur nez à la vitre. Ezekiel leur fit un doigt d'honneur, avant de disparaître dans un compartiment et de se caler contre la vitre, bien décidé à ne pas parler. Il boudait. Ses parents lui mettaient la pression à tel point qu'il sentait une sueur froide lui couler dans le dos ; à un tel point que ses mains étaient moites et qu'il se faisait l'effet d'un idiot. Serpentard. Ezekiel ne savait que trop ce que ça signifiait. Ça signifiait être méchant. Il avait l'estomac noué à cette idée. En plus, sa mère lui avait préparé un sandwich au beurre de cacahouètes qui avait tout l'air.. dégoûtant. Il restait ainsi dans ses pensées, inconscient du fait que quelqu'un venait de se faufiler dans le compartiment, à son tour. Il stressait. Encore plus qu'avant. Le train s'ébranla, commença avec lenteur son chemin. Ezekiel frissonnait un peu. Les autres étaient collés aux vitres du couloir pour faire signe à leurs parents. Lui il restait là, un peu maussade. Ils revinrent. Il avait changé de position, était maintenant assis normalement et lisait avec un air sérieux sur le visage. « 'tin, j'sens qu'il va aller à Serdaigle, ç'ui là. » Il a grimacé, tant cette spéculation pouvait lui faire peur. « Moi, à Serdaigle ? Pfffeeeuuuuuuuuuuuh (il a un peu exagéré sur le Pff, on l'aura compris). Nan, mais va crever. J'irai à Serpentard, moi ! »

Tous ont eu l'air un peu sceptiques, en regardant les cheveux blonds, la moue contrariée et l’œil pétillant. Une fois loin de ses parents, Ezekiel se sentait.. libre. « Ezekiel. » a-t-il fait avec un petit sourire en tendant sa main. Comme les grandes personnes. « Ce qui explique tout. Willy. » Lui et le brun se serrèrent fermement la main, essayant d'écraser les phalanges de l'autre avant de rire aux éclats. « Ou Willy Wonka. » fit le petit roux à côté, en serrant à son tour la main d'Ezekiel. Il s'appelait Robert. « Willy Wanker, peut-être ? » suggéra Ezekiel. Tout le monde rit de bon cœur, alors que Robert lui tapait le dos avec force. Ils en étaient tous à leur troisième année, sauf Ezekiel qui ne sentait pas exclu, pourtant. Ils parlaient avec animation, si vite et si bien que le voyage passa.. trop rapidement au goût du blondinet. Ils allèrent à tour de rôle aux toilettes pour mettre leurs uniformes. Ezekiel se sentait un peu seul, avec sa cravate grise. « T'inquiète pas, Blondasse. Elle se colorera bien vite. » Il ne semblait pas très convaincu. Un petit silence. Par la fenêtre tout le monde guettait le château. « Attends.. comment tu m'as appelé ? » Tout le monde gloussait comme des hystériques avant d'apercevoir enfin le château. Ezekiel était ébahi. C'était une construction majestueuse, avec des tourelles et tours un peu partout ; un large parc juste derrière et, d'après Robert-Carotte, il y avait même un lac. « On dirait un centre de vacances. » a doucement murmuré le petit nouveau. Les autres rirent. « Tu diras pas ça quand t'étudieras les potions, hein les mecs ? » Ils approuvèrent et laissèrent Ezekiel à son admiration, se retournant vers leurs cartes. Il posait la main contre la vitre. Durant toute son enfance, on l'avait bercé avec les mésaventures des sorciers, ou celle de son père à Poudlard. Hier encore, sa mère lui racontait comment elle avait séduite un Pouffsouffle sous le joug d'un pari stupide et inutile. « Tu sais, les Pouffsouffle, ils servent juste de remparts contre les Cognards, penses-y. » Il avait froncé les sourcils, avec un air soucieux. « Maman, je n'aime pas le Quidditch. » Elle a ri. « Tu ne diras pas ça une fois là-bas. » Oh oui, sa mère savait parfaitement comment attiser son impatience.

Car il était impatient. Carrément impatient, même. Il sentait l'excitation mêlée à l'angoisse et la peur monter dans sa poitrine depuis son ventre. On le laissait tranquille, alors que les figures sur les cartes se lançaient des insultes et plus si affinités. Un instant, Ezekiel pensa qu'il n'était pas le premier à avoir été ici, et il se tourna vers ses camarades. Willy affichait une mine réjouie devant l'air défaitiste de Robert. « Tu me dois, pfeuh, au moins dix chocogrenouilles ! » « Dans tes rêves, ouais ! » « Robert, avoue.. c'est simple, tu as perdu. Voilà. Tu lui dois dix chocogrenouilles. » Ezekiel fit un clin d’œil à Willy en murmurant : « 50-50 » avec un petit sourire. « C'est injuste ! » hurla Robert en lançant ses cartes alors que tous se moquaient gentiment. Finalement, le train s'arrêta dans un crissement à faire rugir de rage mémé. Ezekiel rejoignit les première année. Et finalement, après une ballade assommante d'ennui sur le lac, ils se retrouvèrent au château... La Grande Salle. C'était une grande salle, bondée, remplie d'adolescents bourrés d'hormones et surtout, surtout, insupportables.

Ezekiel aimait déjà être ici.



« Franchement, je te comprends pas, mec. Elle est.. fade. Et nulle. OK, elle a un beau cul mais putain, qu'est-ce qu'elle est conne. » Ezekiel lui frappa la tête avec force. « Franchement, Wanker, t'es trop bête. J'te permets pas. » Willy a ri, en regardant Ezekiel puis la Pouffsouffle tour à tour. « Comment elle s'appelle déjà ? Elisa ? Anissa ? » « Esra. » a lâché Ezekiel, cachant la tendresse qu'il avait à prononcer ce nom. Le brun le regardait avec un petit air mutin, amusé. « En plus, elle a pas besoin de toi. » « Mais si, sinon elle va se faire bouffer. » Un rire. « Ah ouais, tu crois ? Regarde. » Il pointait son index vers la née-moldue, revenant dans sa tenue de Quidditch, jaune et noire. Elle en était aux baguettes avec deux-trois filles que Ezekiel avait déjà croisées. Le genre de personne que lui-même n'aimait pas, alors que réputé pour ne pas être trop compliqué, question filles.. Esra les laissait là, ligotées, et repartait avec une sorte de fierté froide. Ezekiel a souri. « Elle commence à te ressembler. La pauvre. » Le blond a viré ses yeux verts olive vers son ami. « Mais j't'emmerde. Moi, au moins, je suis peut-être insupportable, mais au moins, moi, je crèche pas chez ma sœur en révisant mes cours de l'année dernière. » Il avait dit ça avec un sourire taquin. « Et on ne m'appelle pas Wanker, moi. » Willy se leva, en fourrant ses mains dans ses poches. « Va te faire, Stanford. Vraiment. » Ezekiel ne comprenait pas pourquoi il réagissait ainsi. Il se roula langoureusement dans l'herbe humide du parc, alors que William partait. « Oh allez, sois jouasse. Tu es siiiiii susceptible... » Il avait une petite lueur amicale dans l’œil. Pas Willy. « You're such a dickhead. » Et Ezekiel se retrouvait seul, à soupirer.

« Esra ! Esra ! » Mais elle, partait. Comme un coup de vent, passant entre des doigts désespérés. Ezekiel, de dépit, shoota dans l'armure la plus proche, qui grinça pour exprimer son mécontentement.